Mes passagers s’en disputent la direction,
Ils sont en nombre, j’ahane, on me fouette,
Je me tourne pour implorer la compassion.
Le théologien répond sur une croix perché :
« L’homme honore par l’esprit la divinité,
Mais dans son enveloppe est inscrit le mal,
Aussi est-il bon de mépriser le corps et l’animal. »
Le philosophe défend la même cause :
« L’homme est béni par la Sainte Raison,
La bête, d’elle privée, est simple chose,
Par là, le premier fait ce qu’il veut au second. »
« Considéré que tout animal est à merci corvéable,
Pour prouver ce qui n’est plus à démontrer,
Défaire et refaire même expérience est louable »,
Le savant ânonne avec un air satisfait.
Le financier policé, tablier et couteau sanglants :
« L’animal est, de la nature, chèque en blanc,
On peut tailler dans le nombre sans compter,
Personne n’a intérêt de bilan à arrêter. »
« Télévision dernier cri,
Dignité à crédit,
Saucisses à gogo,
Conscience à vau-l’eau,
Voiture, encore, changer,
Pouvoir d’achat à recharger. »
Voilà tout le programme du socialiste,
Qui vérifie : « Non, tu ne figures pas sur ma liste. »
Le consommateur dans son fauteuil avachi :
« J’ai tellement grossi, je ne peux plus bouger. »
Baille-t-il avec ce qu’il lui reste d’esprit :
« Je suis déjà bon citoyen, pourquoi me moraliser ? »
Son frère épicurien en gobant du foie gras :
« Puis, agneau égorgé après ses premiers pas,
Et porc à l’étouffé au sein de ses compères,
Mon plaisir ne me trouve jamais réfractaire. »
Et l’artiste sur son nuage d'ouate, vrai et beau ?
« Je peux violenter sans crainte les animaux,
L’art est un absolu par-delà les arêtes morales,
Ce qui importe, c'est de forcer le génial. »
Dieu !
L’astrologue me voit-il dans sa boule un avenir ?
« Il n’y a pas assez de place pour te contenir,
La conscience est la mesure de l’homme,
Et elle se borne toute à sa pomme. »
Oui, si la mythologie fait le monde le dos d'Atlas ployer,
Sur sa surface, c'est bel et bien le mien de bête que foule l'humanité !
10 mars 2011
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