Comme il en a déjà instruit, Le Lapin sauvage a quitté Lyon pour sa voisine Saint-Étienne il y a quelques semaines. On pourrait penser, comme celle-ci ne cesse de voir sa population décroître, qu'il tombe à pic pour y remédier, sauf qu’il est célibataire ! Du moins est-il tombé sur un voisinage qui n’est pas tout à fait hostile aux animaux et à leur cause, car depuis son emménagement, il peut relever la présence, dans le tour littéralement de son pâté de maison, de deux petites affiches sauvages faisant la promotion du végétarisme.
Au tournant de droite, l'une, sous l'interrogation « mammifères ''supérieurs'' et mammifères ''exploitables'' ? » exhibe une photo choc prise dans un abattoir au-dessus du commentaire : « Votre morceau de viande provient d'un être sensible ». Au tournant de gauche, l'autre se borne à une déclaration : « Manger de la viande provoque de graves souffrances au animaux ! »
Au vrai, ces affiches ne sont pas très voyantes, mais elles sont là. Qui les a mises, je ne sais. Quel peut être leur impact, je ne sais non plus. Elles incitent au régime que suit naturellement un animal de mon espèce, et peut-être font-elles réfléchir de temps en temps un passant. En tous les cas, elles sont là, fixées comme obstinément, tandis que l’hypocrisie, la mauvaise volonté, les atermoiements de la société font perdurer jour après jour un sort cruel aux animaux, qu'ils soient destinés à l’élevage ou à d'autres fins, dans un éternel retour du même scandale.
Je fais cette allusion à un certain philosophe allemand à l’esprit et à la moustache fournis, car veut la légende, ce serait après avoir jeté en larmes ses bras autour du cou d’un cheval que son maître battait dans une rue de Turin, scène lamentable fréquente avant l'avènement des voitures, que le philosophe de la volonté de puissance, qui souffrait de syphilis, est tombé dans l'état complet de torpeur où il a passé les dernières années de son existence. Étrange anecdote que je ne rapporterai pas directement à la cause animale, faute d’en savoir plus à son sujet, mais dont je me servirai, en une ultime pirouette, ce texte tournant sur lui-même de façon infernale comme les anneaux que Dante descend avec Virgile dans La Divine comédie, pour dire que, pour quelqu’un qui regarde en face la réalité de la condition animale et qui ne s’en détourne pas, il y a de quoi s’arracher les cheveux tous les jours, tout le tour d'un pâté de maison avec ces deux affiches qu’un(e) inconnu(e) ou des inconnus ont laissé à la vue de tous…
14 février 2012
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