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Je m’employais à achever enfin L’Homme unidimensionnel d’ Herbert Marcuse quand mon portable retentit.
— Comment te l’annoncer ? Dilamar P. va laisser un grand vide dans les caisses des bars de Lyon, voilà ce qu’il y a ou ce qu’il n’y a plus ! Je ne sais pas, je suis si bouleversée !
— Pourquoi a-t-il des sucres sur les yeux ?
— Au Brésil, il est coutumier de mettre des pièces sur les paupières des personnes décédées. Mais comme Dilamar était poète, c’est tout ce que j’ai pu trouver dans l’appartement !
— Espérons que Charon, sur la barque qu’il fait voguer sur le fleuve des morts, s’en contente !
— Sinon, Dilamar se noiera cette fois, j’en suis sûre. Si tu avais vu comment il a atteint la rive l’autre jour ! Il a éclaboussé tous les passagers du bateau en essayant de nager comme les chiens, sauf qu’on aurait dit un saint-bernard ivre ! Quelle honte ! Je ne savais plus où cacher mes oreilles !
— Ah ! Tu te souviens quand il est tombé dans la Saône ?
— Enfin, que va-t-on faire pour l'enterrement de notre cher sans le sou ? Pour ma part, je n'ai guère d'économies.
— Au vrai, moi non plus.
— Hum ! Peut-être as-tu déjà entendu parler de l'artiste anato-miste Gunther von Hagens qui expose des cadavres écorchés et plastifiés d'êtres humains. On pourrait très bien lui proposer d'enrichir son œuvre avec celui d'un poète maudit, qu'en dis-tu ?
— Tu crois que voir les viscères d’un poète serait très intéressant ?
— La meilleure poésie est celle qui vient du plus profond de soi ! Et puis quelle publicité originale pour mieux...
Ce fut alors qu’un faible bruit, comme celui de la chute d’un petit objet, nous fit nous retourner l’Ondine des fleurs et moi.
21 novembre 2011
(Crédit photo : J. Ange, A. Buehrle & Dilamar P.)
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